Mes vieux profs…  Je lisais, voyeuse, les lignes que vous écrivez, et je me disais « ils ne savent peut-être pas »…  Mes vieux profs ne savent peut-être pas ! J  Ils ne savent peut-être pas l’incidence qu’ils ont eu dans ma vie, dans la vie des milliers d’enfants, de jeunes, d’adultes maintenant… pas plus qu’ils ne savent l’incidence qu’ils ont toujours aujourd’hui, sur l’autre génération, celle de mes enfants qui bénéficient, par personne interposée, de ce qu’ils ont semé en-dedans de moi…

 

Mes vieux profs…  Ils font toujours partie de ma vie, beaucoup plus que je ne le croyais moi-même…  Quand une difficulté se profile sur mon chemin, il me reste d’eux, une phrase, un encouragement, un sourire, un enseignement, un exemple pour passer les caps plus ardus.  Il me reste d’eux le reflet de ce qu’ils ont vu en moi, que j’ignorais moi-même alors…  Il me reste tellement…

 

Mes vieux profs…  Quelques-uns ont pris leur retraite, la seule vraie à mon sens… Celle qu’on prend quand nos yeux se ferment pour toujours… surtout quand on est prof… ou parent… ou amour…  Et étrangement, eux aussi demeurent et continuent à semer…  Un bien grand mystère…

 

Mes vieux profs…  Et je me demande si j’ai su, quand moi je suis passée dans vos vies, vous laisser, ne serait-ce que l’écho de mon appréciation…  Peut-être pas… Juste au cas, juste au cas où je n’aurais pas su… merci pour tout !  Merci plus particulièrement à celles et ceux d’entre vous qui m’ont inculqué l’amour des mots, qui m’ont ouvert toute grande la porte de cet univers fascinant. C'est le monde que vous m’avez donné, par le biais de la lecture, la liberté, par celui de l’écriture.

 

Ceci étant dit, je n’ai pas fait carrière dans la linguistique et vous devrez reconnaître qu’il me faut une forte dose de courage (ou d’étourderie) pour vous faire parvenir ce message et me livrer ainsi à la meute de stylos rouges bien affûtés que vous êtes probablement toujours !  Ah !  Je vous imagine derrière vos lunettes, salivant sur ma copie et la colorant de petits cercles, de ratures et de commentaires qui, jadis, me faisaient frémir et perdre toute confiance en moi !  Tout ce rouge que vous avez répandu sur mes feuilles ! Cruels ! J  Et pour les rusés qui usaient d’encre bleue, ou verte, ou noire pour tromper ma vigilance… je vous ai démasqués !  Je n’y ai vu que du rouge !

 

Mes vieux profs… et n’allez pas vous imaginer que votre mission est accomplie et que vous pouvez vous asseoir sur vos lauriers et contempler votre œuvre les bras croisés ! Quand on écrit « au cas ou », est-ce que le « ou » prend un accent grave… et si oui, pourquoi ? Vous aimiez les questions à développement il me semble ! J

 

Danielle Cloutier, finissante en 1982.

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