LES MANOIRS (fin)

 

 

Un rappel : les textes qui suivent et ceux des deux éditions précédentes ont été écrits par Mme Micheline Lachance dans la revue L'Actualité. Merci Mme Lachance d'avoir permis à Louise de nous les faire connaitre.

 

 

À Pointe-Platon, le manoir Joly-De Lotbinière

 

On les a surnommées « les trois cannelles ». Belles à souhait, les demoiselles Chartier de Lotbinière étaient une denrée rare comme l’écorce aromatique du même nom. En particulier la cadette, Julie-Christine, qui hérite, en 1828, de la seigneurie de Lotbinière, juste après avoir rencontré l’homme de sa vie.

 

Qui n’aurait pas eu le coup de foudre pour le séduisant Pierre-Gustave Joly, Suisse fortuné ? Grand voyageur, il deviendra l’un des premiers photographes de l’histoire. Initié à ce nouvel art par son inventeur français, Daguerre, le seigneur rapportera d’Athènes le premier cliché connu du Parthénon. Cinq de ses images figurent aussi dans le tout premier recueil de photographies publié en France, en 1840, qu’on peut voir au manoir Joly-De Lotbinière.

 

Baptisé Maple House, ce manoir se dresse sur un cap dominant le Saint-Laurent, à Pointe-Platon, en face de Deschambault. La grille de bois s’ouvre sur une allée bordée d’érables. Julie-Christine et Pierre-Gustave y couleront des jours heureux. Pas éternellement, hélas…

 

Eh oui ! En ce 19e siècle romantique, les couples se font et se défont comme aujourd’hui. Après avoir fait prospérer la seigneurie de sa belle, Pierre-Gustave retourne vivre en Europe. La seigneuresse de Lotbinière remet alors les rênes de son domaine à son fils, Henri-Gustave, qui deviendra premier ministre du Québec en 1878.

 

Si l’on doit au mari de Julie-Christine ce manoir tout en frises et en dentelles, pour leur part les jardins bucoliques, la pinède et les 260 noyers noirs centenaires sont l’œuvre de son fils. « La grande passion de monsieur Henri, c’était la forêt, dit Hélène Leclerc, directrice du Domaine. Sans son père, qui l’a poussé en politique, il aurait passé sa vie à mener des expériences arboricoles et à pêcher le doré avec ses sept enfants.»

 

Un homme de contradictions, ce seigneur-politicien. Opposé à la Confédération, qui, craint-il, étranglerait les Canadiens français, il rêve de voir le fils de la reine Victoria monter sur le trône du Canada.

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