CAPSULES HISTORIQUES

IMMIGRANT MALGRÉ LUI

Il serait faux de prétendre que tous les Français rêvaient de venir s’établir en Nouvelle-France. Certains arrivèrent par hasard et repartirent encore par hasard. C’est ce qui arriva à Jean-Baptiste Couture, vers 1658. C’est une histoire qui ressemble à un conte, mais c’est une histoire vraie…

La naissance de Jean-Baptiste Couture est, en soi, un roman. Fils de Gilles Couture et de Guillemette Mériel, il vit le jour en 1651, entre l’Angleterre et Gilbratar, parce que son père, séjournant dans la région de Londres avec sa jeune femme, voulait que celle-ci retourne accoucher en Normandie. La mère et le nourrisson regagnèrent leur maison où Guillemette mourut trois ans plus tard. Gilles Couture fut sans doute très affligé, mais il trouva rapidement une nouvelle épouse. On raconte que cette femme prit l’enfant en grippe et songea à le faire disparaître.

Pourquoi voulut-elle  faire disparaître l’enfant ? Parce qu’il était doué, intéressant, vif et, surtout, parce que son père semblait avoir pour lui plus d’affection que pour les autres enfants qui venaient de naître.

Madame Couture avait de l’imagination et … un frère, propriétaire de navire. Profitant d’une absence de son mari, elle entraîna Jean-Baptiste au port de Saint-Aubin et le confia à son frère. Elle lui demanda de prendre l’enfant de six ans avec lui et de l’abandonner dès qu’il le pourrait, et de préférence au Nouveau-Monde.

Un beau matin, l’enfant s’éveilla, seul, sur les bords du Saint-Laurent. Une famille, demeurée anonyme, l’adopta en lui laissant toute la liberté dont il pouvait avoir besoin. C’est ainsi qu’il vécut à l’abri des dangers, heureux et insouciant. Un jour, il crut reconnaître le navire de son oncle. Il fit de grands signaux, lança des cris. Le capitaine, étonné et curieux, l’envoya chercher. Il fut surpris d’entendre l’enfant lui demander nouvelles de France et même de gens que tous deux connaissaient. Bouleversé, il décida de ramener l’enfant chez lui.

Il le rendit à Gilles Couture à qui on avait raconté que l’enfant était disparu, noyé, sans doute, au cours de l’une de ses excursions au bord de la mer. L’histoire de Jean-Baptiste se raconta à travers toute la Normandie et des bienfaiteurs applaudirent son courage en lui donnant les moyens de s’instruire.

Notre « Moïse » mourut, âgé de 77, ans en pleine gloire littéraire puisqu’il était membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Les gens venaient l’entendre, convaincus que cinq ou six conférences de Jean-Baptiste Couture valaient trois ou quatre cours de rhétorique.

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